
Le gouvernement guinéen peine à digérer les conclusions du rapport accablant de la mission d’évaluation des besoins électoraux des Nations unies, publié le 10 janvier 2025. Ce document met en lumière une détérioration de l’espace démocratique et un rétrécissement des libertés fondamentales sous le régime de transition.
Un diagnostic alarmant
Le rapport de cinq pages dresse un constat préoccupant sur la situation politique et institutionnelle en Guinée. Il évoque notamment la fermeture progressive de l’espace civique et de l’état de droit ; la dissolution d’une cinquantaine de partis politiques et la suspension de dizaines d’autres ; la montée de la répression contre la dissidence et la liberté d’expression ; la fermeture des principaux médias audiovisuels privés ; l’augmentation des arrestations et disparitions forcées de figures opposées au régime ; l’absence de clarté sur le calendrier de retour à l’ordre constitutionnel.
Une réaction gouvernementale virulente
Visiblement agacé, le Premier ministre Amadou Oury Bah a vivement critiqué ce rapport lors d’une intervention lundi sur la télévision nationale.
« Quelqu’un vous demande de venir évaluer ses besoins, et vous peignez tout en noir, sans rien voir de positif », a-t-il dénoncé.

Il a également accusé la mission onusienne d’être biaisée et proche de l’opposition guinéenne. « Ce n’est pas un blanc qui a dit ça, c’est un expert africain », a-t-il ajouté, qualifiant cette évaluation de « tourisme négatif ».
Le chef du gouvernement a annoncé son intention de discuter du rapport avec la Coordonnatrice du système des Nations unies en Guinée et d’autres responsables étatiques.
Un front de communication pour contrer le rapport
Comme si la communication du Premier ministre ne suffisait pas, le porte-parole du gouvernement a organisé un déjeuner de presse ce mercredi à Conakry. Au cours de cette rencontre avec des journalistes, Ousmane Gaoual Diallo a vigoureusement dénoncé le rapport qu’il qualifie sans détour de « brouillon » tout en accusant l’ONU de vouloir « jeter du discrédit sur la Guinée ».
« Nous avons le sentiment que c’est un brouillon qui a été diffusé. Nous avons le sentiment que c’est pour jeter du discrédit sur la Guinée », a-t-il déclaré.
Pour rappel, la mission d’évaluation des Nations unies s’est déroulée du 4 au 15 novembre 2024 à la demande du gouvernement guinéen. Ironiquement, c’est le Premier ministre lui-même qui avait sollicité cette évaluation, adressant une lettre officielle à Rosemary DiCarlo, Secrétaire générale adjointe aux Affaires politiques et à la consolidation de la paix de l’ONU, le 24 juillet 2024.
Faut-il anticiper une opposition entre l’ONU et la junte, susceptible d’exacerber les tensions politiques en Guinée, dans un contexte de transition de plus en plus incertain ? Watt and see…