La presse guinéenne entre menaces et résignation

2 janvier 2024 3 min(s) pour lire
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Dans sa volonté de réduire au silence et d’intimider la presse, la junte guinéenne a mis en place plusieurs mesures liberticides : restriction de l’accès à internet et à des plateformes de réseaux sociaux,  brouillage des fréquences de radios, retrait de radios et TV sur les bouquets canal+ et StarTimes, règlements de comptes au nom du fisc…

La situation dure depuis plusieurs semaines déjà et du côté des associations de presse l’on est partagé entre espoir, résignation. Au début, certaines associations notamment le Syndicat des Professionnels de la Presse de Guinée (SPPG) étaient favorables à l’idée d’engager des actions de protestations notamment l’organisation de journées sans presse et le boycott des activités du gouvernement. Mais ils n’obtiendront pas le soutien des patrons de médias plutôt favorables au dialogue. Ces derniers espéraient qu’en allant vers des ambassadeurs, religieux et facilitatrices du dialogue national, ils obtiendraient gain de cause. C’était sans compter sur la détermination des autorités décidées à fermer tous les médias jugés très critiques.

Face donc à ce blocus, la presse guinéenne semble accepter son « sort ». Tout le monde décide de se conformer à la réalité du moment en se disant peut-être que les choses se débloqueront d’elles-mêmes.

Pourtant, la loi donne la possibilité aux associations de presse d’intenter des procédures juridiciaires notamment contre Canal+ et StarTimes pour non exécution des obligations contractuelles (si contrats existes).

La Haute Autorité de la Communication (HAC) qui a ordonné le retrait des médias sur ces bouquets sans raison valable est également passible de poursuite notamment devant la Cour Suprême conformément aux articles 40 et 41 de la loi L/2010 / 02 / CNT du 22 juin 2010 portant sur la Liberté de la Presse.

Qu’est-ce qui empêcherait donc les associations de presse à emprunter un tel chemin ?

De plus en plus fragilisés économiquement notamment par la révolution numérique mais aussi par les redevances de l’Etat et les conséquences de ces mesures restrictives, il faut reconnaître que la presse guinéenne est désormais dans la tourmente. Au-delà de la menace de fermeture de certains, ce sont les emplois qui sont aussi menacés. Des coupes dans différentes salles de presse ne sont pas à exclure dans les jours à venir.  Et, certains pour mieux exister, on décidé de faire allégeance aux militaires en réaménageant leurs grilles des programmes. C’est le cas de la radio Fréquence Info Médias (FIM), une radio aimée pour son indépendance et sa ligne éditoriale qui a finalement décidé de retirer toutes les émissions politiques et interactives de sa grille pour se tourner vers la culture, les sports, l’industrie de l’événementiel… Un triste sort pour un média qui a réussi en un laps de temps à se faire une place dans le paysage médiatique guinéen.

A qui le tour ? C’est la question qu’il faille désormais se poser. Plus le temps passe, plus la situation économique devient précaire et des emplois menacés. Comme disait l’écrivain égyptien Alaa El-Aswany, « face à toutes formes de dictature, résister est un devoir ».

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