Corruption et détournements en Guinée : l’alerte ignorée, la loi piétinée

25 janvier 2025 3 min(s) pour lire
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La Guinée fait actuellement face à une véritable épidémie de détournements de fonds publics, suscitant indignation et consternation au sein de l’opinion.  Pourtant, cette situation n’a rien de surprenant. Dès le début, journalistes, acteurs de la société civile, hommes politiques et simples citoyens n’ont cessé de lancer des alertes. Les signaux étaient pourtant évidents : une course effrénée à l’enrichissement illicite s’est installée, où corruption et détournements semblent être devenus des pratiques presque banales dans la gouvernance.

Au lieu de s’attaquer à la racine du problème, les autorités ont préféré la répression. Des journalistes ont été suspendus, parfois pour des durées allant jusqu’à six mois, et des médias ont été fermés simplement pour avoir osé exposer des faits qui, aujourd’hui, ne font plus débat.

Des lois solides, mais ignorées

En plus, la Guinée dispose d’un arsenal législatif solide pour prévenir et réprimer la corruption. Prenons par exemple la loi L/2017/N°0041/AN du 4 juillet 2017 sur la prévention, la détection et la répression de la corruption. Cette loi impose à tout agent public une obligation de déclaration de patrimoine. À l’entrée en fonction, chaque agent doit déclarer l’ensemble de ses biens, valeurs, avoirs et intérêts et à la fin de son mandat ou de sa fonction, il doit également justifier l’origine des biens acquis en cours de mandat ou de fonction, surtout s’ils dépassent ses revenus. Cette déclaration, conformément à l’article 27, doit être déposée dans un délai de trois mois après la prise de fonction et dans les trois mois suivant la fin de celle-ci.

Qui est concerné ? Les agents de l’État ou agent public. C’est-à-dire, toute personne qui détient un mandat législatif, exécutif, administratif ou judiciaire, à titre permanent ou temporaire, rémunérée ou non, quel que soit son niveau hiérarchique. L’article 16 précise que l’expression « agent public » inclut notamment le Chef de l’État, les ministres et toute autre autorité exécutive ; les députés, les membres des institutions constitutionnelles ; l²es magistrats et les membres des services de défense et de sécurité…

La loi L/2020/0026/AN du 19 décembre 2020, portant Code de conduite de l’agent public, vient renforcer ces exigences. Son article 28 stipule que les agents publics désignés doivent déclarer leurs biens pour garantir transparence et protection du patrimoine national.

Mais combien de responsables ont réellement déclaré leurs patrimoines depuis le début de la transition ? Aucun, à ma connaissance, y compris le président de la transition lui-même.

L’exemple doit venir d’en haut

Aujourd’hui, force est de constater que ces lois restent lettre morte. Même ceux qui prétendent lutter contre la corruption et les détournements semblent réticents à appliquer ces dispositions à eux-mêmes. Pourtant, la prévention est toujours plus efficace que la répression lorsque la corruption est déjà profondément enracinée.

Une société saine repose sur une application stricte et équitable des lois. Mais pour que cela fonctionne, l’exemplarité doit venir d’en haut. Comme le dit l’adage : « Le poisson pourrit par la tête. » Il est donc temps que ceux qui détiennent le pouvoir montrent l’exemple et appliquent les lois qu’ils sont censés défendre.

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