Guinée : le FMI tire la sonnette d’alarme sur l’économie

19 mai 2024 5 min(s) pour lire
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Les perspective économiques de la Guinée pour 2024 sont peu reluisantes. C’est du moins ce que l’on peut retenir du rapport pays N°2024/130 du Fonds Monétaire International (FMI) publié le vendredi 17 mai 2024. Selon l’institution financière, « la position extérieure de la Guinée s’est détériorée et est jugée nettement inférieure au niveau qu’impliquent les fondamentaux et les politiques souhaitables ».

Le rapport indique que le déficit du compte courant s’est creusé pour atteindre 8,7 % du PIB en 2023, dans un contexte de baisse des exportations d’or et de produits non miniers et d’importations plus élevées de produits alimentaires, de carburants et de biens d’équipement.

Les réserves de change ont aussi diminué, passant de 3,4 mois d’importations (prospectives) en décembre 2022 à 2,4 mois en janvier 2024. Les derniers chiffres incluent déjà un rebond partiel suite à l’application de l’exigence de rapatriement des revenus miniers et à une suppression progressive des garanties de la banque centrale pour le pétrole.

Le FMI précise également que l’explosion du terminal pétrolier de Conakry en décembre 2023, devrait avoir de lourdes conséquences sur la croissance, l’inflation et le secteur budgétaire et extérieur en 2024. Même si un financement d’urgence de 71 millions de dollars à été fourni récemment pour contenir les retombées immédiates de l’explosion, la croissance du PIB réel devrait décélérer, passant de 5,7 % en 2023 à 4,1% en 2024 (1,2 points de pourcentage de moins que la projection d’avant l’explosion). 

Les pénuries de carburant qui ont suivi l’explosion ont fait grimper les prix des transports et de la nourriture. Le rapport indique que l’inflation moyenne devrait atteindre 11,0% en 2024 et le déficit budgétaire global (dons compris) devrait se creuser, passant de 1,6% du PIB en 2023 à 3,0% en 2024, contre 2,4% du PIB dans le scénario pré-explosion, reflétant  la baisse des recettes et les dépenses liées à l’explosion. Cela conduit à des besoins de financement immédiats estimés à 164 millions de dollars américains. 

En outre, le déficit du compte courant devrait se creuser considérablement, passant de 8,7% du PIB en 2023 à 10,6% en 2024, ce qui entraînerait des besoins urgents de financement de la balance des paiements. 

Quant aux réserves brutes, elles devraient tomber à 2,2 mois d’importations à la fin de 2024. Les perspectives à moyen terme semblent cependant relativement positives si les retombées du choc de l’offre pétrolière restent contenues. 

Faut-il s’attendre à des pénuries de carburant ?

Les autorités guinéennes ont souligné l’impact négatif et très incertain de l’explosion du dépôt principal d’hydrocarbures de Conakry. Elles ont présenté deux scénarios : un scénario de référence et un scénario pessimiste.

Le scénario de référence, qui est proche des projections du rapport du FMI, suppose que les pénuries de carburant peuvent être contenues à 15% pour l’essence et à 5,6% pour tous les autres produits pétroliers en 2024. La croissance du PIB réel ralentirait à 4,2% en 2024. 

Selon un scénario pessimiste, les autorités tablent sur des pénuries d’essence plus graves de 25%, entraînant une croissance plus faible du PIB réel de 3,6% en 2024.

Dans les deux scénarios, les recettes budgétaires et les dépenses des ménages seraient inférieures, en ligne avec l’impact sur le PIB réel. Le déficit du compte courant se creuserait en raison de la hausse des coûts d’importation des produits pétroliers et de la construction d’un nouveau dépôt. 

D’autres crises exogènes et endogènes pourraient affecter l’économie

Sur le plan mondial, le FMI pense que les conflits pourraient s’intensifier, les prix des matières premières resteront volatils et la croissance économique mondiale pourrait faiblir. La Guinée serait affectée par l’inflation, les recettes d’exportation du secteur minier et les importations de pétrole.

Sur le plan intérieur, l’impact de l’instabilité des approvisionnements en carburant, de la détérioration de la situation politique et de l’instabilité sociale pourrait affaiblir l’économie de manière plus grave, tandis qu’un recours accru du gouvernement au crédit bancaire et au financement monétaire de la banque centrale pourrait entraîner de graves risques d’inflation. Cela pourrait évincer le crédit du secteur privé, alimentant la pauvreté et mettant en danger la stabilité du secteur bancaire.

Des recommandations

Le Fonds Monétaire International demande aux autorités de poursuivre les efforts visant à accroître la diversification dans le cadre du Programme de référence intérimaire (PRI) et du Plan de relance économique (PRE), mais aussi de promouvoir un dialogue politique inclusif qui pourrait contribuer à atténuer les risques nationaux.

Un dosage prudent de politiques budgétaires et monétaires à court terme est aussi recommandé pour contenir les pressions inflationnistes et  permettre aux autorités de protéger les plus vulnérables tout en mettant en œuvre leur ambitieux programme de réformes.

Les autorités devraient également s’assurer que le projet Simandou apporte les bénéfices attendus pour l’économie.

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